Injustice en 2021
J’ai été plus silencieuse sur La maisonnée au printemps. J’étais très préoccupée. Je devais mettre beaucoup d’énergie à me battre, à réfléchir, à tenter de trouver des solutions à ma conciliation santé-travail-famille car mon employeur ne me permet plus de le faire. C’était assez clair comme propos et très catégorique : «Nous te demandons de choisir un emploi qui correspond à tes besoins familiaux.» Hé oui! Aussi simple que ça pour des bureaucrates. Après plus de 15 ans à leur emploi, plus de 20 ans dans le domaine, sans tache au dossier et sachant très bien que je livre la marchandise, je suis «gentiment» balayée de la main parce que je ne suis pas à 100% du temps de ma tâche. Bref, tu ne peux pas faire 5 jours? Ben ciao bella! Prends gentiment la porte s.v.p.
J’ai été foudroyée d’entendre de la bouche de mon employeur de me trouver un emploi qui correspond à mes besoins et ceux de ma famille. J’ai validé ce que je venais d’entendre puis suite à une réponse positive, la colère est montée en flèche. En 2021, 2021 là, pas 1950, je ne peux pas croire que ça se passe encore. Si la femme ne peut pas être LA CARRIÉRISTE (celle qui se donne corps et âme pour son travail, qui accepte tout et n’importe quoi, celle qui fait des heures supplémentaires sans les compter ni les charger, celle qui répond présente peu importe le jour, le soir, la nuit ou les journées de congé), si tu n’es pas cette femme-là, tu tombes direct dans le panier de pommes pourries. Le pire, c’est que je faisais beaucoup de ça. Justement parce que 1) j’aime mon travail et 2) je sentais une pression de devoir en faire plus que supposé dans le but de plaire aux supérieurs et de leur devoir une certaine reconnaissance car il me faisait «une fleur» de me permettre de concilier mon travail et ma famille. Mais malheureusement, pour des bureaucrates et des carriéristes, il n’y a pas d’humanisme. Je n’étais qu’un numéro parmi tant d’autres. Un matricule parmi d’autres. Je ne pouvais pas croire non plus, qu’en 2021, avec toute la sensibilisation qui est fait autour de la santé mentale et de la différence, je me fasse répondre une absurdité comme ça. On veut justement que la société et les employeurs soit plus compréhensifs et conciliants! Il est évident que les souliers ne suivent pas les babines! On vise une société inclusive… ce n’est clairement pas comme ça qu’on y arrivera.
En me demandant de choisir un emploi qui correspond à mes besoins familiaux c’est comme si on m’enlevait la seule partie de moi qui me reste que J’AI choisi. J’ai choisi d’avoir des enfants c’est vrai. Mais je n’ai pas choisi d’avoir des enfants différents et/ou malade. Quand je suis tombée enceinte, je ne me suis pas dit : «Oh! Je me souhaite tellement d’avoir des enfants aux besoins particuliers!!!» Non. Pas pantoute. Je souhaitais, comme tout le monde, d’avoir un enfant en santé. Même le sexe du bébé ne m’importait pas. Je souhaitais juste qu’ils soit en santé et qu’il aille la vie la plus douce possible. Comme la majorité des parents espèrent pour chacun de leur progéniture.
J’ai choisi mon métier, ma carrière.
Je ne me définis pas juste comme une mère d’enfants différents. Je voudrais aussi être une femme pour quelqu’un qui la trouve «hot» même à torcher des enfants, une maison, à gérer des crises et dans l’intimité. Je voudrais aussi être une travailleuse et vivre divers accomplissements autre que faire des suivis de r-v, des thérapies et des tâches ménagères.
Bref, j’ai besoin, moi aussi, peut-être même plus encore qu’une maman d’une famille neurotypique, d’avoir de la reconnaissance pour ce que je fais. Personne ne sait à quel point c’est exigeant tant que tu ne le vis pas. M’enlever mon travail que j’aime et que j’ai choisi, c’est m’enlever la seule chose qui me restait que j’avais choisi. Tout le reste s’est évaporé avec la venue du premier atypique. Le social, l’autonomie, les activités, les horaires, les passe-temps, etc. Ma vie est sacrifices pour lui. Tout est en fonction de lui, tout le temps. Je ne peux pas suivre mes amies dans leurs milles et une activités. Je dois toujours prendre en considération les différents stimulis, le changement de routine, le facteur nouveauté, le facteur d’épuisement des jours avant et ceux qui suivront après le ou les activités. Je l’aime d’amour mon p’tit homme et je ne l’échangerait pour rien au monde. Même si j’ai l’impression d’avoir perdu ma vie «normale». Je me dois d’accepter et de me faire à ma vie devenue atypique afin d’avancer et d’être en mesure de profiter de chaque moment qui s’offre à nous.
L’employeur se dit prôner la conciliation travail-famille. C’est d’une telle incohérence! « Si tu n’es pas capable de faire ton travail à temps plein et de faire ton rôle de mère avec tes enfants aux besoins particuliers, ben reste chez vous ou trouve-toi une job moins importante» Le message était pas mal ça mais avec des mots plus…diplomates. Avec les emplois que l’on m’a suggéré par la suite pour me «supporter» à travers ma démarche, je me suis sentie réduite, rabaissée, dénigrée. Je me suis sentie rejetée, j’ai senti que je n’avais plus ma place tout simplement parce que je ne peux fournir du 5 jours/sem. alors que je sais pertinemment que je suis compétente. Je l’ai vécu comme de l’injustice, comme de la discrimination.
Maintenant je dois faire mon deuil (voir mon texte «Après le deuil, les deuils») puis m’adapter à un autre emploi à temps partiel. C’est extrêmement difficile à vivre pour la santé psychologique. Elle qui est déjà fragile due à la lourdeur du quotidien avec des enfants différents et face à une dynamique familiale bien complexe. Disons que les familles atypiques avec des besoins particuliers n’ont pas besoin de ce stress ni de ce soucis supplémentaire. Nous avons besoin d’être soutenu, supporté et avons besoin d’humanisme. Nos enfants ne sont pas de petites machines que nous pouvons mettre sur «off» ou «low» tsé. Ce sont de petits humains qui fonctionnent à plein régime jour et nuit, sans période de vacances et qui dépendent des adultes. Je pense qu’il est temps que la société se mettent au diapason. Ça presse.
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