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Photo du rédacteurLa maisonnée

C'est quoi la différence?

«C’est quoi un enfant différent?» M’a-t-elle dit en me regardant avec de grands yeux interrogatoires et suspicieux.


Je lui ai répondu que mon fils était «handicapé». Et voilà que mon p’tit homme qui a fortement réagit hurle tout en étant contentionné par sa petite mère toute menue: je ne suis pas un handicapé!!! Je lui réponds : «Ton cerveau est différent et on en reparlera mon cœur. Là, tu dois te calmer.»

La commis s’approche de moi et me dit : «Oui, il faudrait qu’il se calme là parce que les gens se questionnent et ça dérange les clients.» C’est à ce moment que j’ai respiré un bon coup pour ne pas lui garocher en pleine face que je me câlissais ben de ses clients actuellement. Mais ce serait leur donner raison de leur montrer que la pomme est pas tombée loin de l’arbre si la mère ne gère pas ses émotions exactement comme le petit qui n’est plus si petit. Avant, quand il était dans le 0-3 ans, les gens trouvaient ça cute un petit garçon en crise avec ben du caractère. Maintenant, à 8 ans, ça les dérange. Ça les dérange parce que c’est assez hors norme de voir un garçon de cet âge crier, hurler des mots vulgaires tel que pénis et marde ainsi que tous les mots bibliques typiquement québécois. C’est assez hors norme de voir un enfant insulter sa mère comme ça en public, la frapper, et garocher tout ce qui se trouve sur les étagères par terre.

C’est quoi un enfant différent? Ben m’a te l’dire moi c’est quoi. C’est lui décrit ci-haut. C’est un enfant qui a des troubles d’adaptation. C’est l’enfant qui est clairement beaucoup trop turbulent, qui parle fort, qui réagit fortement même quand il trouve quelque chose de beau. C’est l’enfant qui ne te regarde pas et ne te réponds pas quand tu lui parles. C’est l’enfant qui crie, qui traite sa mère de pleins de noms méchants et dégradants, qui est impoli envers elle comme jamais tu manquerais de respect envers la tienne. C’est l’enfant que tu vois qui a un langage vulgaire, qui frappe et/ou qui lance des choses .C’est l’enfant que tu vois couché au sol avec sa mère qui le tient avec une force raisonnable et qui l’empêche de bouger. C’est ça la différence.

Quand je vois les gens réagir, me regarder avec tout plein de jugements, quand j’en vois aborder mon fils et lui dire qu’il n’est vraiment pas gentil avec sa mère (by the way, il est juste fâché et anxieux. Sa mère il l’adore pis y’a voit dans sa soupe), quand des employés viennent me voir alors que je suis en pleine gestion de crise, en contention physique sur mon fils et qu’ils me disent qu’il faudrait qu’il se calme parce que l’on dérange les clients, je viens bleu marin.

Penses-tu réellement que c’est comme ça que j’élève mon fils? Penses-tu vraiment que j’accepte ses comportements et ses insultes? Dans ces occasions, j’ai vraiment envie de crier à tout le monde que mon enfant est différent. J’ai envie de me promener avec une pancarte qui affiche qu’il est différent. Pis pour ceux que ça évoque absolument rien le mot différent ben dis-toi que c’est comme le mot handicapé. Mon fils est pleins d’handicaps invisibles. Il ne parvient pas à s’adapter à notre monde. Et quand il y parvient, dis-toi que ça lui a demandé des années de travail et d’efforts pour essayer d’être comme tu voudrais qu’il soit. Il s’adapte avec difficultés.

Je voudrais pour 2020, pouvoir sortir avec mon fils et sentir de la compassion de la part des gens au lieu de sentir du mépris et du jugement. Ça me blesse profondément. Même si j’essaie de passer par-dessus ces regards et ces commentaires et qu’après toutes ces années «d’expériences», ça devrait peut-être me couler sur le dos comme sur celui d’un canard, non. Ce n’est pas comme ça que ça se passe. Ce n’est pas comme ça que je le vis. Chaque fois, ça me touche et ça me fend le cœur. Je reviens à la maison et je pleure. Déjà que les désorganisations de mon fils me ramènent constamment vers notre réalité et vers l’évidence, je vis toujours du découragement. Avec les regards et les commentaires, je vis du jugement et un sentiment d’incompétence qui me blesse et me fait de la peine. Pourtant, je sais que je suis une excellente mère pour mon fils. J’ai aussi de la peine pour lui. Pour son estime de lui-même entre autre. Déjà qu’il doit gérer les conséquences de ses mauvais choix et de son manque de contrôle, il doit, en plus, gérer les atteintes à son image. Pis moi qui doit en rajouter pour expliquer ce que les gens entendent et sont en train d’observer. « Mais pourquoi t’explique me dis-tu?» Pour éviter que les gens pensent que j’abuse de mon fils. Pour éviter que les gens pensent que je le bats, le maltraite ou que je sois en train de le kidnapper. Ça serait le comble si quelqu’un appelait la police. C’est bien la seule chose qui ne me soit pas encore arrivée.


On fait des pieds et des mains tous les jours pour qu’il se fasse confiance et qu’il ait une bonne image de lui malgré ses moments sombres. Il sait qu’il a des choses à travailler et je te jure qu’il travaille fort. Il n’est pas parfait. Il le sait. Il se dénigre assez lui-même qu’il n’y a pas besoin de personne d’autre pour le faire. Et d’ailleurs, il n’y a personne de parfait dans ce monde.

Pour la prochaine année, je souhaite que mon vœu d’amener les gens à plus de compassion et moins de jugements se réalise. J’espère que ce souhait sera partagé et voyagera le plus possible pour atteindre et sensibiliser le maximum de personnes de notre société.



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